Prolongez la campagne l'exemple c'est nous

Ce site est une archive de la campagne de Yapaka "L'exemple, c'est nous".

La campagne est terminée mais le matériel reste à disposition si vous le souhaitez.

Contrôles renforcés, Tolérance zéro, abaissement de la majorité pénale : toutes les idées médiocres, toutes les mauvaises farces ont été ânonnées ces dernières semaines. En tête de cortège le maïeur d’Anderlecht s’en allant claironnant qu’il allait « curer » les zones de non-droit de sa commune. Qu’importe si le verbe pue le Dettol et rappelle subtilement le Karcher du grand voisin, il fallait en imposer, et vite. Stopper la chienlit, mettre au pas les trublions, embastiller les insolents. Vite, disais-je…

Aux infos à la radio, dans les débats dominicaux, en pleine page dans les journaux, durant plusieurs jours on n’a parlé que de ça. De ces gamins violents qui ont trop de droits et ne respectent plus rien, pas même la police. De ces victimes innocentes, malmenées, car-jackées, sac-jackées, toujours traumatisées.

Il n’y a bien sûr pas à sourire de ces brutalités quotidiennes : elles sapent dangereusement les fondements même du vivre ensemble et s’attaquent lourdement à la sécurité personnelle et collective des citoyens. Elles doivent être combattues.

Mais ne laissons pas croire aux idées magiques et trompeuses : la détention, l’enfermement arbitraire ne règlent rien. Tout au plus peut-on espérer mettre la société à l’abri durant quelques moments. De nombreuses recherches en attestent, le profil général de ceux qui y sont soumis ne s’améliore pas au contact de la prison. C’est pour cette raison notamment que le législateur a prévu qu’avant 18 ans, aucun enfant (sauf la déplorable mesure de dessaisissement) ne soit jugé comme un adulte et puisse bénéficier des avantages d’une ou plusieurs mesures éducatives. Celles-ci sont nombreuses et variées mais, c’est notoire, bien trop peu utilisées. Un peu comme l’autruche qui s’enfonce la tête dans le sable, nous persistons vainement à croire dans les vertus salvatrices de la privation de liberté…

Mais là n’est pas mon propos. Ce récent épisode de déchainement vengeur à l’égard d’une certaine jeunesse révèle une nouvelle fois l’extrême difficulté de faire le lien entre différentes formes de violence : celles invisibles et insidieuses, souvent liées à de mauvais fonctionnements institutionnels (relégation scolaire, chômage endémique, insuffisance de structures sportives, culturelles, d’aide ou d’accueil …) et celles visibles, répréhensibles et que d’aucuns aimeraient tellement pouvoir mieux sanctionner. Disons-le très simplement : tant que nous n’aurons pas l’audace de nous attaquer à la pauvreté à ses conséquences[1], aux relégations scolaires absurdes qui empêchent les enfants d’obtenir un statut meilleur que celui de leurs parents, aux discriminations en tout genre, il n’y a pas à espérer d’amélioration sensible du sentiment de sécurité, principalement dans les zones précarisées des grandes villes.

Mais surtout gardons à l’esprit que la principale source de violence et d’insécurité, toujours citée en premier dans les enquêtes sur le fameux sentiment d’insécurité, reste… la route. La route et son cortège de drames : conducteurs agressifs à l’abord des écoles, alcoolisés de retour de soirée, fans de vitesse hors circuit. Cette violence reste la toute première cause de mortalité des enfants et ses conséquences font aussi de nombreuses victimes indirectes, parents, frères et sœurs d’enfants ou de jeunes disparus bien trop vite. Lors des opérations de sécurité organisées le week-end dernier dans le cadre du marketing de la « tolérance zéro » on a bien sûr découvert quelques armes blanches, quelques migrants sans papiers, quelques grammes de cannabis. Mais la police a surtout décernés plus de 600 PV pour infraction de roulage… L’exemple, c’est qui ?

 

[1] Un peu de pub : voyez aussi à ce sujet le « rapport sur les incidences et conséquences de la pauvreté sur les enfants, les jeunes et les familles » sous http://dgde.cfwb.be